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DÉCOUVERTE DE LA BROUSSE SACRÉE DE NIODIOR - Ôbakola, la brousse où l’on interdit de parler wolof

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DÉCOUVERTE DE LA BROUSSE SACRÉE DE NIODIOR - Ôbakola, la brousse où l’on interdit de parler wolof

 

L'OBS - Appelée Ôbakola par les sérères, la brousse sacrée de Niodior a une particularité peu commune : on y interdit l’usage du wolof. Découverte.

L’endroit respire la spiritualité. Le calme plat qui y règne est captivant. Hauts perchés sur leurs racines, les fromagers séparés les uns des autres par de petits passages s’imposent au loin. L’un d’eux force l’attention. Plus long, avec un feuillage abondant, le fromager est debout le long de la porte d’entrée. Au bas de l’arbre, des bols vides ou contenant des restes d’aliment sont soigneusement rangés. 

Des écailles de poisson sont entassées dans une cuvette jaune. A gauche de l’arbre, des bouteilles vides traînent çà et là, à droite de l’arbre, la propreté attire. La chose semble bizarre, mais elle est tout à fait normale, vu par le maître des lieux. Bienvenu à ÔBakola, la brousse sacrée de Niodior où il est interdit de parler la langue wolof. Dans cette partie de la forêt des îles du Saloum, le sérère, langue très parlée dans ces zones est la seule acceptée pour les visiteurs de cette brousse sacrée et mystique. «Il y a un génie raciste qui vit dans cette brousse et pour protéger les habitants contre la venue des étrangers, il n’accepte que les visiteurs qui parlent sérére», explique le gardien de ce temple. De lui, l’on ne retiendra qu’un petit surnom : Bouba. De commerce facile, il apparaît avec une coiffure bizarre, seules quelques touffes de cheveux poussent sur son crâne chauve. Et pourtant Bouba (il n’a pas encore 30 ans) est très jeune, trop jeune peut-être pour pouvoir communier avec un génie. «Ce sont ses grands parents qui étaient les détenteurs des secrets de cette brousse. Maintenant, c’est lui qui en est le gestionnaire, car avec l’islamisation, les vieux ont tendance à ne plus s’occuper de ces pratiques», confie le guide. L’histoire de cette brousse s’est faite avec l’avènement du village. Au début, tout visiteur était obligé de passer par cette brousse pour entrer dans le village. Dans le lot des visiteurs, les étrangers y avaient une place de choix. Une fois dans le village, certains d’entre eux avaient l’habitude d’élire domicile. Un acte qui n’enchantait pas le génie protecteur. Ce dernier décida de sévir. «Le génie est très raciste, il ne voulait pas que les étrangers s’emparent du village. C’est ainsi qu’il est apparu en rêve à un vieux, pour lui demander de dire aux populations de parler plus fréquemment sérére pour se distinguer des étrangers qui n’avaient pas leur place dans le village», narre-t-il d’un trait.

«Celui qui commet l’erreur de parler wolof dans cette brousse aura une déformation de la bouche»

Mais cette exigence du génie, c’était aussi et surtout pour éviter la spoliation des terres par des individus venus d’autres horizons. A la différence de Mariama Sangomar, le génie qui officie dans cette brousse est d’une méchanceté extrême. Il ne plaisante pas quand il s’agit d’agir. «Il faut toujours faire des sacrifices et des offrandes pour qu’il ne se fâche pas, sinon, il risque de faire des dégâts.» De ces dégâts, Niodior en retient certains. «Les fonctionnaires nouvellement affectés dans cette zone avaient tous les problèmes du monde pour retenir leurs enfants. Ceux-ci suivaient les enfants du village pour aller jouer et ils parlaient wolof par mégarde. Par la suite, ils tombaient malades, avaient des déformations. Car celui qui commet l’erreur de parler wolof dans cette brousse a une déformation de la bouche.» Des cas comme cela, ils n’en manquent pas à Niodior. Bouba explique : «Cela est arrivé aux enfants d’enseignants, de médecins, mais il n’y a jamais eu mort d’homme. Il n’aime pas trop les étrangers et ne veut pas partager ses terres.» Les victimes du maître de la brousse sacrée sont obligées de demander pardon, d’implorer la clémence du méchant génie. Et pour ce faire, il faut accepter d’être attaché au fromager et que les anciens du village fassent des offrandes pour te tirer d’affaires. «Les anciens du village ont des recettes qu’un seul maîtrisent pour calmer le génie. En général, on y verse du sang ou du riz. Ou encore on distribue des boulettes de riz ou de mil aux enfants en guise d’offrande pour demander pardon au maître des lieux», assure-t-il.

«Tous les étrangers qui ont acheté des terres près de la brousse ont fini par abandonner»

Ôbakola, c’est aussi l’histoire d’un génie mystique. «Il n’est pas donner à n’importe qui d’entrer dans ces lieux. On n’y retrouve parfois des choses qui peuvent faire peur. Il y a de gros serpents qui rodent tout autour pour surveiller les lieux.» Loin d’être une légende pour eux, les habitants de Niodior croient dur comme fer à cette histoire entrée dans leur tradition. «Vous avez vu les bols qui traînent par terre, il les utilise pour ses repas quotidiens. On lui donne à manger. On dépose les bols remplis de mets au bord de l’arbre et quelques heures plus tard, quand on revient, on y trouve des bols vides ou des restes d’aliments», jure Bouba avec insistance. Ses repas sont constitués d’aliments diversifiés, mais surtout de poissons. Ce qui trouve son explication dans le fait qu’il y a beaucoup de pêcheurs dans le village qui ramènent du poisson pour sa nourriture.

Les habitants de Niodior ne craignent pas cette coexistence avec la forêt, mais les étrangers ne sont pas toujours les bienvenus. «Beaucoup d’étrangers avaient acheté des terres ici pour y construire des hôtels ou des campements, mais ils finissent toujours par abandonner les projets. Parfois, on ne trouve pas l’explication, ils partent sans prévenir», insiste Bouba, en pointant du doigt des terres inhabitées que l’on aperçoit au loin. L’histoire de Ôbakola se referme avec ses pages pleines de mystère.

CODOU BADIANE (ENVOYEE SPÉCIALE AUX ILES DU SALOUM)

source: http://www.gfm.sn/actualites/item/5681-decouverte-de-la-brousse-sacree-de-niodior-ôbakola-la-brousse-où-lon-interdit-de-parler-wolof.html