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Les faveurs accordées aux entreprises étrangères et nationales ou alors le manque de rigueur des Etats africains à recouvrer correctement les impôts fait perdre à l’Afrique entre 40 et 80 millions de dollars (entre 20.000 milliards et 40.000 milliards FCFA) par an. Des pertes que le président de la République, Macky Sall entend corriger. Ou du moins, c’est ce que le Chef de l’Etat du Sénégal a fait savoir hier jeudi, à l’ouverture de la 3ème Conférence internationale sur l’émergence qui se tient sur 3 jours, à Dakar.   

 

40.000 à 80.000 milliards dollars de pertes par an ! C’est ce que l’évasion fiscale, les flux financiers illicites, l’acquittement équitable de l’impôt, le congé fiscal abusif coûteraient au continent africain qui souffre déjà de divers maux plombant son décollage économique. Cette révélation a été faite par la Commission indépendante pour la réforme de l’impôt sur les sociétés. Informé d’une telle situation, le Président de la République, Macky Sall a pris un coup de froid dans le dos. Toutefois, le Chef de l’Etat n’entend pas laisser cette situation perdurer. Il semble même décidé d’aller en croisade contre ces goulots qui étranglent les économies africaines. 

D’emblée, pour freiner l’hémorragie Macky Sall entreprend quelques mesures. «D’abord, il faut lutter pour l’acquittement équitable de l’impôt par tous les redevables…, en limitant le congé fiscal abusif. L’impôt doit être payé là ou l’activité crée de la richesse et du profit», a-t-il martelé.

Avant de renseigner: «Selon les estimations de la commission indépendante pour la réforme de l’impôt international sur les sociétés chaque année entre 40 et 80 milliards de dollars de taxes échappent au continent africain. Il faut en finir avec l’humilité fiscale indigne».

Les investisseurs invités à respecter les obligations fiscales

Convaincu que l’Afrique peut se développer avec ses propres ressources sans avoir recours à l’aide publique au développement, le chef de l’Etat déclare : «Si l’impôt dû à l’Afrique est payé, le débat sur l’aide publique au développement ne se poserait pas. L’Afrique est donc fondée à réclamer plus d’équité entre les droits légitimes de l’investisseur et ses obligations fiscales vis-à-vis du pays hôte».

Sous ce rapport, «il convient d’agir fermement contre l’évasion fiscale et les flux financiers illicites», a soutenu Macky Sall. Confortant son propos, il rappelle : «Au titre de mon mandat du président en exercice du NEPAD, j’ai souvent porté ce message au sommet du G7 et du G20 pour une meilleure coopération dans ce sens. Et à ce sujet, je salue les initiatives de l’Ocde (Organisation de coopération et de développement économiques, Ndlr) sur la fiscalité internationale, initiative soutenue par les institutions de Bretton Woods (Banque mondiale, Fonds monétaire international)».

Des correctifs à apporter…

Pour les pays africains, particulièrement ceux en développement, «la révision du système fiscal international devrait inclure trois priorités essentielles, à savoir : l’assistance technique en matière d’identification de besoins de réformes et de planification stratégique, le renforcement de capacité des administrations fiscales, y compris le soutien à la dématérialisation des procédures et formalités et le soutien à la réforme des Codes miniers et du Code des hydrocarbures pour des contrats plus équitables qui énumèrent l’investisseur et génèrent des ressources conséquentes pour l’Etat».

Elargir la base de partenariat

Selon le chef de l’Etat: «l’emploi constitue la seconde source de financement du développement. Et à ce sujet, une évidence s’impose à nous. Le cercle des partenaires se réduit, lorsqu’il s’agit de bâtir des infrastructures majeures, indispensables à la réalisation de l’objectif d’émergence. Alors l’Afrique qui se développe avec plus 30 millions de kilomètres carrés doit nécessairement élargir la  base de ses partenariats. A cette fin, il ne peut y avoir ni de chasse-gardée, ni exclusivité, ni exclusion… Tous les partenaires publics, privés et traditionnels et nouveaux sont les bienvenus sur le continent…», a indiqué Macky Sall.

Macky pour un «secteur privé national viable et compétitif»

En phase avec ses invités sur la nécessité d’industrialiser l’Afrique au nombre desquelles personnalités, Ibrahima Boubacar Keïta, président de la République du Mali, du Premier ministre Malaisien, Mahathir Bin Mohamad, du Premier ministre Ivoirien Amadou Gon Coulibaly, du président du Groupe de la Banque africaine de développement Akinwumi Adesina, de Ségolène Royal, représentante du président Français Emmanuel Macron, le chef de l’Etat dira: «La problématique de l’industrialisation est capitale. Une Afrique en quête d’émergence ne peut se résigner à la seule exportation des matières premières, qui sont souvent mal rémunérées… et à des prix dérisoires. Il nous faut une Afrique qui émerge, et qui transforme ses matières premières pour créer des chaines de valeurs, générer des emplois et vaincre le chômage endémique des jeunes».

Et pour ce faire: «Nous devons réformer, innover et poursuivre les efforts d’amélioration de l’environnement des affaires pour attirer plus d’investissements privés et saisir les opportunités de délocalisation de ce pays…».

Ceci fera dire au chef de l’Etat: «Plusieurs pays africains, à l’image du Sénégal se sont déjà engagés dans la création de parcs industriels. Et des zones économiques spéciales. Et notre pays s’est inspiré d’autres pays qui l’ont précédé sur cette voie… En même temps les politiques publiques devraient continuer à soutenir la naissance et l’épanouissement d’un secteur privé national viable et compétitif. C’est aussi un impératif de premier ordre sur la voie de l’émergence… Cet élan est aujourd’hui en cours, il est incarné par des hommes et des femmes d’affaires africains qui investissent non seulement dans leur propre pays, mais aussi ailleurs en Afrique et dans le monde…. Ces femmes et hommes sont une source d’inspiration pour nos jeunes entrepreneurs…».

L’inclusion sociale, un défi à relever

A cette problématique, Macky Sall admet que «l’inclusion sociale reste un défi majeur pour les pouvoirs publics en Afrique comme ailleurs. Elle pose frontalement la question de la finalité de la croissance. Quand des couches vulnérables sont laissées pour compte, cette question appelle à des réponses adaptées au contexte de chaque pays». Se voulant pragmatique, il cite en exemple le Sénégal: «S’agissant du Sénégal, nous avons mis en place des initiatives à travers des programmes novateurs comme la couverture maladie universelle, les bourses de sécurités familiales, le programme d’urgence de développement communautaire (Pudc)…».

IBRAHIM BOUBACAR KEITA, PRESIDENT DU MALI A LA CIEA : «Ma  priorité c’est mettre en place une armée digne de nom»

Prenant part à la troisième conférence internationale sur l’Emergence de l’Afrique (Ciea) de trois jours, ouverte hier jeudi 17 janvier au Centre international Abdou Diouf de Diamniadio, le chef de l’Etat Malien apportant sa réflexion au thème a, de prime abord dévoilé sa priorité. «Ma priorité, c’est doter le Mali d’une armée digne de nom», avant de poursuivre: «Nous avons compris que quand le monde s’occupe de vous, vous avez un devoir réel de vous qualifier. J’entends par là, l’éducation, la formation, la technologie…Car, sans cet apport scientifique point de développement». Et le chef de l’État d’affirmer que sous son magistère, les secteurs porteurs d’un développement certain ont été identifiés dont principalement le secteur agricole avec l’augmentation de la production agricole en ligne de mire. Et d’annoncer: «Nous avons décidé d’allouer 15% de notre budget au secteur agricole». Il soutient que «l’eau potable et l’accès à des soins de santé ne doivent pas être un luxe pour les populations maliennes. Car, pour lui le temps de sébile est terminé», a-t-il décrété.

AKINWUMI ADESINA,  PRESIDENT DE LA BAD A LA CIEA : «L’Afrique ne peut pas faire tout en même temps…»

Face à l’énormité des défis et enjeux de l’heure, le président de la Banque africaine de développement (BAD), Akinwumi Adésina demeure convaincu que le développement de l’Afrique ne fera pas en un claque-doigt. Selon lui : «Il faut prioriser des secteurs à même de porter l’émergence. Et c’est ce que nous avons compris en ciblant 5 secteurs clés d’investissement pour accompagner l’Afrique». Il s’exprimait, hier jeudi, à Dakar, à l’ouverture de la 3ème Conférence internationale sur l’Emergence de l’Afrique. A l’en croire: «Nous devons croire en nous-mêmes. Car, Dieu est avec nous! Il nous a beaucoup donné par rapport aux autres. Par conséquent, nous devons impérativement stabiliser le continent, en sécurisant nos populations, sans quoi l’émergence ne sera que chimère», a-t-il averti.

TONY ELUMELU, ENTREPRENEUR NIGERIAN : «Le développement de l’Afrique doit passer par les PME»

L’économiste entrepreneur et philanthrope nigérian, Tony Elumelu, dans son intervention à l’ouverture de la 3ème Conférence internationale sur l’émergence de l’Afrique a vivement souhaité voir les Petites et moyennes entreprises émerger en Afrique pour impulser le développement. Confortant ainsi le président de la Banque africaine de développement (Bad) Akinwumi Adésina, qui, auparavant avait laissé entendre que «ce sont les Pme qui portent le développement de l’Afrique et non les grandes entreprises…». 

Selon M. Elumelu et non moins président directeur général de Transnational Corporation of Nigeria, de Heirs Holdings et de United Bank for Africa, «les pays africains n’ont pas toujours priorisé les Pme dans le développement de leur tissu économique. Donc, c’est une erreur à corriger!», estime-t-il.

Convaincu de cet impératif, il affirme que «le secteur privé du continent est prêt et souhaite aider les gouvernements à développer le continent beaucoup aujourd’hui plus que par le passé». Il ajoute: «A travers les ajustements structurels, on a regardé le secteur privé de façon suspicieuse. Cela n’est plus le cas. Nous devons créer l’environnement favorable pour l’éclosion du secteur privé».

Enfin, il dira: «Nous devons aller travailler à l’éradication de l’analphabétisme en Afrique. Donc, les capitaux vont pouvoir aider à améliorer ce système mais aussi la gestion des contrats et l’Etat de droit. Afin que tout ceci se fasse, nous avons besoin d’un secteur privé fort».

 

source: https://www.sudonline.sn/macky-sall-avocat-de-lafrique_a_42564.html