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Afrique

Macky Sall n’a pas répondu aux attaques de son prédécesseur. Dans un entretien accordé à Tv5, Rfi et Le Monde à la veille de l’ouverture du XVème Sommet de la Francophonie, le chef de l’Etat sénégalais déclare n’avoir pas de souci politique, prône la limitation des mandats, plaide pour une diversité linguistique et parle d’un pays «positivement sanctionné» par les sociétés de notation.

Au moment où son prédécesseur s’est engagé dans une «guerre ouverte» contre lui, le Président Macky Sall a décidé d’opposer le mépris à Abdoulaye Wade. Le chef de l’Etat sénégalais, dans un entretien accordé à Rfi, Tv5 Monde, a déclaré qu’il se «donne comme opposant la crise contre la jeunesse.

 

 La crise qui peut frapper la jeunesse comme celle de l’emploi, les questions sociales». Après avoir affirmé : «Je serai heureux d’avoir comme opposant mon prédécesseur qui a un âge très avancé». «J’ai eu une coalition très large qui m’a accompagné, qui continue à m’accompagner. Je n’ai pas d’inquiétude électorale, sinon je n’aurai pas réduit mon mandat de 2 ans. C’était ça ma préoccupation, je n’ai pas de souci politique par rapport à mon devenir».

 

 

Le chef de l’Etat déclare que ses efforts sont «concentrés sur la protection sociale des populations sénégalaises». «J’ai déjà énormément mis de ressources dans le transfert direct de ressources vers le monde rural, en particulier, vers les ménages démunis avec les bourses de sécurité familiale, une prise en charge médicale, une gratuité des soins pour les enfants âgés de 0 à 5 ans et surtout une Couverture maladie universelle (…) C’est ça le combat pour moi, l’enjeu. Le reste ne m’inquiète pas, j’ai été très bien élu, il y a juste deux ans et demi. J’ai fait le tour du Sénégal pendant 3 ans et demi, j’ai fait plus de 90 mille kilomètres en voyant la réalité de notre pays et en créant des liens très solides aussi».

Limitation des mandats
Refusant de s’ériger en donneur de leçons à l’endroit de ses homologues du continent, Macky Sall fait savoir : «Je me suis fixé comme horizon de réaliser un mandat de 5 ans. Mais comme j’ai été élu pour 7 ans, il faut une réforme de la Constitution pour procéder à la réduction. Je ne suis pas du tout obligé de le faire, j’ai voulu le faire pour donner l’exemple que l’on peut renoncer, que le pouvoir n’est pas une fin en soi. Donc, je ferai 5 ans et certainement je demanderai la confiance de mes concitoyens pour poursuivre la politique qui est entamée». «Aujour­d’hui avec la mondialisation, la culture de l’information, de l’internet, nous ne sommes plus dans les années 50-60, le monde a changé, les citoyens aussi. Donc, la manière de gouverner aussi a changé, par conséquent les deux mandats me paraissent être un idéal. Si on n’a pas fait quelque chose en une décennie, on n’aura plus le temps». «(…) Chacun devrait méditer ce qui se passe actuellement pour éviter des soubresauts, des violences inutiles (…)». 
Macky Sall se dit «surpris par la soudaineté» de la tournure de la crise burkinabè. «Mais tout le monde pouvait s’attendre à ce qu’il y ait des difficultés dans la réforme constitutionnelle du Burkina. Moi, j’aurais conseillé simplement à ce que cette réforme se fasse par référendum et qu’ils prennent beaucoup de temps pour le dialogue avec l’opposition», suggère Macky Sall.

Limogeage de Alioune Ndao
«Les procureurs sont des magistrats debout, ils ont une hiérarchie et sont différents des magistrats du siège. Le procureur dépend du garde des Sceaux. Par conséquent, l’essentiel est qu’il réponde de la procédure, notamment de l’avis du Conseil supérieur de la magistrature (Csm). Ce qui a été constant et fait», explique le chef de l’Etat. 
Le limogeage du procureur Aliou­ne Ndao est revenu dans le propos du Président Sall. Il souligne : «Le choix du procureur n’a rien à voir avec la procédure en cours». Parlant d’un présumé lien entre limogeage de Ndao et la volonté prêtée à ce dernier d’élargir le nombre de personnalités à poursuivre, Macky Sall soutient : «C’est possible. Mais ce n’est pas à moi, président de la Répu­blique d’interpréter des divergences en­tre un procureur et le garde des Sceaux. Mais s’ils ne s’entendent pas, la logique voudrait que le garde des Sceaux propose son changement, c’est ce que j’ai accepté». 
«Tout dépend de l’opportunité. Comment voulez-vous que le Séné­gal qui est suffisamment engagé dans ce procès, puisse ouvrir vingt dossiers en même temps, mettre les gens en prison, je ne le pense pas. Il faudrait procéder par étape, parce que nous n’avons pas tous ces magistrats, tous ces enquêteurs. Il ne faut pas bâcler la procédure judiciaire (…)», préconise-t-il.

Affaire Karim Wade
Poursuivant toujours avec le procès de Karim Wade, il a évité de s’ingérer dans ce dossier judiciaire. «(…) Ce dossier est pendant devant la justice. La justice étant différente du pouvoir exécutif, vous comprendrez que je ne puisse pas me prononcer sur un procès en cours. (…) Vous avez dit qu’il n’y a pas de preuve. Vous devriez vous rapprocher de ce qui se passe au Tribunal, de la partie civile, de la défense pour vous faire une idée. Je ne crois pas simplement que pour des raisons politiciennes ou politiques, l’on puisse mettre quelqu’un en prison sans fondement», explique Macky Sall. Qui s’empresse de concéder : «Main­tenant, c’est un procès à relents politiques, je le conçois, puisque la personnalité qui est concernée, c’est le fils de l’ancien président de la République, ancien ministre d’Etat, donc forcément il y a un relent politique. Pour autant, faites confiance à la justice sénégalaise qui a été choisie par l’Union africaine pour juger le Président Habré. C’est une justice qui a fait ses preuves. Ce n’est pas aujourd’hui avec ce procès qu’elle va perdre sa crédibilité». 
Macky Sall s’est aussi inscrit en faux contre le fait que la Crei ne puisse pas permettre un recours. «Ce qui retarde ce procès, c’est qu’à chaque étape les avocats de la défense ont usé de recours devant la Cour suprême qui s’est déjà prononcée sur deux recours, il y en a d’autres qui sont pendants à la Cour suprême. Donc, me dire qu’il n’y a pas de recours, ce n’est pas vrai. Ce qu’il y a, c’est qu’il y a un moment pendant l’instruction où il n’y avait pas de recours. (…) «Cette Cour, ce n’est pas moi qui l’ai inventée, elle était là, je n’ai fait que la réactiver. On n’a jamais voulu la faire fonctionner. Elle a été réactivée selon les normes du droit sénégalais», précise-t-il.

Paradoxe politique sénégalais
«Le paradoxe est que c’est ma famille libérale qui est dans l’opposition. C’est elle qui gouvernait, c’est logique qu’elle soit dans l’opposition, note-t-il, faisant référence à ses anciens camarades du Pds. Mais il y a aussi des frères libéraux qui ont décidé de me rejoindre dans le combat que je mène pour le Sénégal et je leur souhaite la bienvenue». «C’est très spécial, c’est sénégalais justement. Parce que ce qui m’a lié à la gauche sénégalaise, ça a été le partage de valeurs sur la nécessité de défendre la République au moment où on a failli perdre cet acquis fondamental. (…) En tant que Libéral, je me classe comme un Libéral social. C’est pourquoi ma politique est à forte connotation sociale (…) Mais il faut l’allier à une dose sociale forte parce qu’une croissance sans inclusion n’en est pas une», tente de convaincre Macky Sall.

Gouvernance
Le chef de l’Etat est d’avis que ses compatriotes ne tardent pas voir les changements qu’il leur a promis. «Depuis deux ans et demi, beaucoup de choses ont été faites. Tout n’a pas été fait, il est clair qu’en deux ans et demi on ne peut pas changer les choses radicalement. Mais ce qui est important, c’est l’amorce qui a été faite, la gouvernance qui a été imprimée», a indiqué le Président Sall. Qui soutient qu’il y a eu beaucoup de «ruptures fondamentales» par rapport à la gouvernance Wade «sur la perception de l’impunité». Illustration, à son avis : «Dans ce pays, vous pouvez interroger dans la rue les Sénégalais s’ils pensent que la justice est devenue beaucoup plus équitable ; est-ce que les citoyens sont égaux devant la loi». 
A propos de la gouvernance et de la perception de la lutte contre la corruption, le Président Sall parle de «résultats positivement sanctionnés par l’opinion sénégalaise, la communauté internationale, l’ensemble des sociétés qui font de la notation (Ndlr : dernier rapport du Doing business)», faisant du Sénégal un pays qui «a beaucoup progressé en matière de gouvernance en deux ans».

Ebola
A propos de la lutte contre Ebola, le chef de l’Etat sénégalais appelle à plus de soutien de la part de la communauté internationale à l’endroit des pays touchés par le virus. Il a affiché son opposition à une mise en quarantaine de l’Afrique et rappelle l’ouverture par le Sénégal d’un corridor humanitaire et la réouverture des frontières maritimes avec les pays touchés. Il appelle à une résillience et à une maîtrise de la maladie. 
Macky Sall a également rendu hommage à Abdou Diouf, secrétaire général sortant de l’Oif, qui «a réussi à élever le niveau de représentation de l’Oif». Il prône une diversité linguistique afin que le français cohabite avec les autres langues comme l’anglais et les langues nationales. «La Franco­phonie est utile. Si ce n’était pas elle, nous autres les pulaar, les wolofs aurons du mal à communiquer dans le monde. Nous communiquons à travers une langue qui a fait le tour du monde, une langue qui est quand même parlée par plus de 200 millions de locuteurs». 
Enfin, le Président Sall a justifié l’absence d’appel d’offres pour la construction du Centre de conférences de Diamniadio par le délai très court – 15 mois – de réalisation de l’infrastructure, confiée à des entreprises turques qui étaient en mesure de faire le travail attendu d’elles en l’espace de 11 mois. 

source:http://www.lequotidien.sn/index.php/la-une2/7505-la-francophonie-se-reunit-ce-week-end-a-dakar--macky-tient-son-sommet