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Ce mois de juin a consacré la Journée mondiale de l’enfance. Une journée marquée au Sénégal par une marche de protestation d’une association de défense des enfants soumis à la mendicité. Et comme d’habitude, l’Etat du Sénégal est invité à protéger cette couche vulnérable, laissée à elle-même, dans les rues de Dakar. 

Tôt le matin jusque tard dans la soirée, ces enfants dont on dit qu’ils apprennent le Coran dans des daaras affrontent les rigueurs d’une prison à ciel ouvert. Pieds nus, des guenilles qui cachent mal les plaies sur le corps, preuve des brutalités physiques dont ils sont souvent victimes, ces enfants maltraités aux yeux de tous doivent être tirés des mains de leurs bourreaux. Oui, on pèse les mots, il s’agit bien de bourreaux, qui leur imposent des pitances, qui les obligent à faire le tour de la ville sans même s’en rendre compte.

Ces images sont devenues tellement banales qu’on s’en accommode sans regrets. La torture sans faim de ces enfants ne semble nous déranger outre mesure. On l’alimente même avec quelques pièces de monnaie, du riz, du pain et autres pour sans doute se donner bonne conscience. Mais au fond, nous encourageons ce phénomène au profit des bourreaux qui n’ont aucune once d’humanisme chez eux.
Seulement, ces gens sans pitié que d’aucuns appellent même pompeusement marabouts auraient dû avoir en face un Etat fort. Lequel veille à la protection de ces enfants, comme il s’en est engagé devant la communauté internationale, en signant des Conventions dans ce sens. Le Sénégal a en effet reconnu, entre autres, le droit des enfants à aller à l’école. Ne serait-ce que pour ce droit, les pouvoirs publics auraient dû sévir en organisant les daaras, sans faire preuve de mollesse dans les décisions. Depuis quelque temps d’ailleurs, on entend s’agiter des maîtres coraniques, foncièrement opposés au projet de modernisation des daaras, comme s’ils étaient au-dessus des lois. Tout ce spectacle qui nous déchire le cœur a aussi fait sortir de ses gonds la Rencontre africaine des droits de l’Homme (Raddho), qui a même déposé une plainte contre le Sénégal pour non-assistance à enfants maltraités en danger. On espère seulement que cette plainte ait des effets après celle déposée, il y a quelques années, par une plateforme d’organisations de la société civile contre le même Etat du Sénégal. Manifestement, il y a de bonnes volontés qui veulent combattre la mendicité des enfants dans les rues, mais sauf qu’en face, il n’y a rien. Que des discours populistes rangés par la suite aux oubliettes dès qu’on entend des cris d’orfraie venant des marabouts ou maîtres coraniques, c’est selon…
Tout le monde se rappelle la décision de Wade en 2010 d’interdire la mendicité à Dakar par le truchement de son Premier ministre d’alors, Souleymane Ndéné Ndiaye. S’en sont suivies des actions d’éclats dans les rues de Dakar avec des courses-poursuites entre mendiants, dont des enfants, et Forces de l’ordre. Mais l’histoire s’est vite terminée en eau de boudin, puisque l’Etat est revenu sur sa décision. A l’époque, l’on disait que Wade avait cédé à la pression des cours maraboutiques. Cinq ans après, les choses restent en l’état, bien que l’Etat ait entrepris de moderniser les daaras. Plus que jamais, celui-ci doit gérer cette affaire avec rigueur et autorité pour protéger les enfants. Tout en appelant également les parents à plus de responsabilités sous peine d’être sanctionnés, ou même emprisonnés s’il le faut. Car faire apprendre le Coran à un enfant, ce n’est pas le livrer poings et pieds liés à un bourreau qui peut faire de lui tout ce qu’il veut… 

source: http://www.lequotidien.sn/index.php/component/k2/mauxdits-non-assistance-a-enfants-maltraites