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universitéLes actes de violence notés la semaine dernière à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) ont remis au goût du jour la problématique des franchises universitaires. Très souvent invoqués, ces textes régis par la Loi n°94 du 24 novembre 1994 font l’objet de diverses interprétations 
Le mercredi 21 mai dernier, l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) a été le théâtre d’affrontements d’une rare violence entre étudiants et forces de l’ordre. Des blessés graves ont été enregistrés des deux côtés. Si ces heurts ont été aussi sanglants, c’est parce que les forces de l’ordre ont investi le campus social et pédagogique alors que, d’habitude, le face-à-face entre policiers et étudiants se limitait juste à l’avenue Cheikh Anta Diop. Les grenades lacrymogènes donnaient la réplique aux jets de pierres.

Mais voilà, ce jour-là, comme le 17 février 2006, la ligne Maginot a été franchie. Les dégâts sont énormes alors que les débats enflent. Le ministre de l’Intérieur, Abdoulaye Daouda Diallo, puis le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Mary Teuw Niane, ont tour à tour martelé que tant que le calme ne serait pas revenu à l’université, les forces de l’ordre ne la quitteront pas. Depuis, c’est l’accalmie. Policiers et étudiants se côtoient et se regardent en chiens de faïence.    
Ces actes de violence et la réaction musclée des forces de l’ordre ont mis sur la place publique le débat sur le respect des franchises universitaires. Souvent invoqués et rarement lus, ces textes régis par la Loi n°94 du 24 novembre 1994 font l’objet de diverses interprétations. Se prononçant sur la question lors d’une conférence qui s’était tenue à la Chambre de commerce de Dakar en début d’année suite à des perturbations notées à l’université, le Pr Mbaye Thiam de l’Ebad avait dit ceci : « Les franchises constituent un privilège octroyé à l’université par le législateur qui considère, a priori, que les universitaires sont tellement intelligents, tellement conscients, tellement au fait de leurs responsabilités qu’ils n’ont pas besoin de police pour les régenter. Ainsi, on les affranchit d’un certain nombre de contraintes qui s’exercent sur l’ensemble des autres secteurs de la société ». Cependant, il avait ajouté que les franchises universitaires ne devaient pas être un slogan ou un concept philosophique qui garantirait l’impunité et autoriserait à tout faire, à tout dire, sous le prétexte qu’on est dans l’espace universitaire.

Eclairage
Que disent ces textes ? En son article 1er  du Titre I, il est écrit que « les universités du Sénégal bénéficient du régime des franchises et libertés universitaires qui garantissent aux enseignants, chercheurs et étudiants, dans le respect des lois et règlements et principes objectifs et de tolérance, l’exercice des libertés indispensables au développement de l’enseignement et de la recherche ». Au Titre II relatif aux domaines d’application des franchises et libertés, l’article 2 du chapitre premier ayant trait à « l’autonomie de police administrative » souligne qu’en application du régime des franchises et libertés, « l’espace universitaire est placé sous le statut d’autonomie de police administrative (…) ». Cela implique que les forces de l’ordre ne peuvent intervenir dans l’espace universitaire, tel que défini par l’article 2, qu’à la demande du recteur de l’université ou de son représentant dûment habilité à cet effet (article 3). Mais, avant de demander l’intervention des forces de l’ordre, l’article 4 stipule que le recteur doit recueillir l’avis de l’Assemblée de l’université. En cas d’urgence, l’article 5 de cette loi indique que le recteur ou son représentant peut demander l’intervention des forces de l’ordre sous réserve d’en informer sans délai l’Assemblée de l’université. Quant à l’article 6, il souligne que lorsque la vie ou la liberté individuelle des personnes présentes dans l’université ou lorsque la sécurité des biens mis à la disposition de l’université sont en danger, d’une manière immédiate, le recteur doit demander l’intervention des forces de l’ordre. En cas d’inaction du recteur ou d’empêchement, l’intervention des forces de l’ordre est de droit. Cependant, elle doit cesser dès que la menace ayant justifié l’intervention disparaît. Alors que l’article 7 note que le statut d’autonomie de police administrative ne fait pas obstacle à l’exercice des activités de la police judiciaire. 
Il ne fait pas non plus obstacle à l’application des lois garantissant l’ordre public sur l’ensemble du territoire national. Cependant, dans cette hypothèse, le recteur ou son représentant est informé de toute opération à mener à l’intérieur de l’université et doit aviser l’Assemblée de l’université.

Elhadji Ibrahima THIAM

source:http://www.lesoleil.sn/index.php?option=com_content&view=article&id=39901:enseignement-superieur-ce-que-disent-les-textes-sur-les-franchises-universitaires&catid=140:actualites