Gambia
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gambie   Ce qu'on sait aujourd'hui de cette seconde ville de la Gambie après la capitale Banjul, c'est qu'elle reçoit depuis 1995 et tous les ans, l'un des plus grands évènements culturels de la sous-région : «The Janjanbureh cultural festival» consacré essentiellement aux questions d'initiations, de cultures, et des rythmes dans l'univers mandingue. Fondée en 1832, dans la grande île du même nom, la petite cité fluviale, qu'on atteint grâce à un bac, est devenue un lieu de visite de la mémoire des cultures du Sud et également un des centres les plus actifs du tourisme en Gambie. Janjanbureh ne s'arrête pas à cela. Grâce à un député gambien, Foday Manka, la ville a renoué avec son histoire sur la circoncision et la place de l'initiation des jeunes à travers la sortie du Kankourang.   

 

Chaque année, l'île organise aussi lors de la circoncision,  une grande fête du Kankourang autour des rites initiatiques de près trois mois, avec plus de 100 enfants (des garçons surtout) circoncis et gardés à une cachette pendant toute la période des vacances scolaires.

Le premier festival culturel de l'ère moderne remonte à 1998; mais, nos sources précisent que le festival culturel de Janjanbureh a été d'abord tenu en 1946 et se faisait tous les cinq ans. Mais la cité n'a pas voulu perdre le fil. L'honorable député gambien, Foday Manka, initié est ainsi l'auteur d'un grand ouvrage, une sorte d'encyclopédie consacrée aux normes culturelles traditionnelles et valeurs de la société mandingue. Voulant redonner ses lettres de noblesse aux cérémonies du Kankourang, il  a exploré presque chaque aspect de normes culturelles traditionnelles et des valeurs, qui font la singularité de cette société en matière d'éducation et de formation de l'homme et de la femme. Cet ouvrage, couvre une analyse vaste et approfondie de la vie africaine, principalement en Gambie, remontant à une centaine d'années avec au centre l'histoire du Kankourang.
 

 

 
Foday Manka a aussi parlé en détail de la circoncision et de la perspective culturelle traditionnelle, avec une référence spéciale à la localité de Janjanbureh dont  il est originaire.  Parlant de la cérémonie de la circoncision, il dira que, «La philosophie de cet évènement est que l'individu est forcé de se conformer aux normes et aux valeurs de la communauté au lieu de ne penser qu'à lui-même. On voit la circoncision comme un droit pour tout le monde, sans tenir compte du sexe, avant de faire des études, pour l'entrée dans l'âge adulte.»

Au sein du Djoudjou, il apporte aussi quelques notions essentielles destinées à l'initiation des enfants, disant que «Le mot "Solima"(le non initié) en termes culturels Mandinka traditionnels né de ce fait, est applicable à toutes les personnes qui n'ont pas eu la chance d'entrer dans le monde de circoncision. Les cérémonies de circoncision dans Janjanbureh ont été d'habitude déterminées par la bonne récolte et le nombre de personnes disponible à subir l'initiation rituelle, suivie, selon le consensus et l'accord réciproque, des membres communautaires pour organiser les cérémonies», explique M. Manka.
 
Quand Dakar aussi se met dans la danse
 
Classé patrimoine culturel immatériel mondial par l'Unesco, le génie protecteur de la communauté mandingue, est également adopté par d'autres ethnies comme les Diola, Baïnouks, Peuls du Fouladou, Balantes, Manjack, etc. A Mbour, le phénomène a pris une telle ampleur, qu'il est devenu un bien défendu par tous les habitants de la ville et de la Petite-côte : Wolof, Sérère, Mandingue, Mancagne, Hal Pular, Diola, Lébou, Sarakholé et Bambara sont à l'unisson pour entonner les mêmes chansons. Sur la Petite-côte, à côté du bord de mer, les pêcheurs lébous ont d'ailleurs trouvé leur maître, en la personne d'un batteur de tambours mandingue, comme tous les grands maîtres. Son nom Moussa Seydi. Moussa, n'est pas griot, mais un initié qui a appris à jouer le tam-tam aux côtés du grand maître, Daouda Daffé. Chaque dimanche, quand sort le Kankourang, c'est forcé que Moussa se rend dans le quartier de Téfess pour faire plaisir à ses nombreux fans.
 
Et maintenant, c'est la capitale qui s'y colle. A Dakar, au gré d'une promenade, il n'est pas rare de voir dans certains quartiers un Kankourang fantaisiste accompagné de deux ou de trois Selbé. Suprême imprudence. Mais qui régente tout cela? Personne. C'est comme devenu l'histoire de tout le monde parce qu'elle ne semble appartenir à personne. Mardi matin (26 aout dernier) c'est en pleine rue, à Liberté 1, qu'un Kankourang fantaisiste ou en vrai, suivi par trois personnes affole le coin, faisant courir à gauche et à droite, les enfants et les filles restés à la maison. Qui a demandé sa sortie? Qui en a donné l'autorisation? Toutes les ambiguïtés sont autour de ces questions. L'année dernière, ce fut le même scénario, un samedi, suivi d'une seule personne, un petit bonnet rouge sur la tête, jouant le mystique, qui était derrière. 
 
Chacun semble libre de sa petite malice; il n'y a plus de chef et il faut «tuer» le mythe. Comme le disait d'ailleurs, une femme qui rencontre, il y a deux ans, en plein quartier de la Sicap Baobab, un Simb déguisé en Kankourang qui demande, avec ses deux coupe-coupe, de la charité aux passants, au nom de la recherche de la paix en Casamance.
Tout le fond de la question est encore là. Où veut-on aller avec cette histoire? Dans l'impasse répondent certains. La télévision est passée par-là, après les journaux.  L'on montre tout,  n'importe où et à n'importe qui. Pourvu qu'il soit riche et qu'il soit prêt à donner de l'argent. En Casamance, dans la région de Ziguinchor, la cérémonie de l'initiation est devenue une fête banale pour les touristes. Cela n'impressionne ni les enfants, ni les femmes. Ziguinchor, quelle belle ville à l'époque coloniale symbolisée comme la terre de démonstration de toutes les facettes de la culture mandingue. 
 
Dans ces territoires, la question de fond qui se pose, tourne autour de la négligence des us et coutumes qui ont fait la réputation de la formation de leurs enfants autour de la question même de l'initiation. Aujourd'hui, tout donne l'impression d'être fait de travers. L'on a vu, dans le Pakao, des personnes demander à des directeurs d'écoles d'arrêter les enseignements donnés à leurs enfants, pour se préparer à entrer dans le Djoudjou. Au mépris de voir l'enfant réussir, l'on met des questions d'argent devant. A Sédhiou, en 2011, pour cause du Ramadan, c'est en pleine période d'ouverture des classes qu'on s'est mis à sortir des Kankourang, en tout genre, parce que des enfants ont été amenés à la circoncision. 
 
Tout près de là, l'exemple est venu du village de Bambali, où des personnes n'ont pas hésité, l'année dernière, à retirer leurs enfants des classes pour les amener au Djoudjou. Pour de l'argent. Mais tout cela n'a pas tué le mythe… Même si le semblant de modernisation et le tourisme ont renvoyé l'univers du Kankourang dans le folklore ordinaire de la cité. Quel gâchis ! Parce que dans l'esprit, la philosophie n'a pas bougé, comme le rappellent avec beaucoup de conviction les maîtres de la parole en Gambie. 
 
Notes
1- Source : Le Kankourang, masque d’initiation des mandingues de la Sénégambie par Alphousseyni Diato Seydi - Master d’Arts plastiques 2007/ ENA.
2 - Lilyan Kesteloot, « Les Mandingues de Casamance : Kankourang, castes et kora », in François-George Barbier-Wiesser (dir.), Comprendre la Casamance : chronique d’une intégration contrastée, Karthala, Paris, 1994, p. 97-117 (ISBN 2-86537-503-X) ;
3-La Gambie : une odyssée africaine Voyage de Virginie Coly (2011) ;
 
source:http://www.sudonline.sn/la-terre-du-festival-du-rythme_a_20658.html