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Le dernier virage d’un mandat : le cadeau empoisonné de la « chiffrite »

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2016 serait l’année charnière du mandat de Macky Sall car s’il respecte son engagement, c’est son dernier virage. Au-delà des aspects politiques, la gouvernance de ce mandat est marquée par l’élaboration et le début de mise en œuvre du PSE qui vient de donner son cadeau de fin d’année au Président de la République avec l’annonce du ministre de l’économie et des finance (MEF) d’un taux de croissance de 6,4% espéré pour 2015. En réalité, l’annonce (prématuré ?) de ce taux est symptomatique de la « chiffrite » de ce mandat. Partout, on voit des chiffres et des statistiques qui s’entrechoquent, s’accordent et se contredisent. 

 

Entre, les taux (de croissance, d’électrification, de bacheliers orientés, d’autosuffisance en mouton, etc.), les rangs (parmi les 25 plus pauvres, top 10 Doing business, 170eme pays en IDH, etc.), et les quantités (900 000 tonnes de riz, 11 décisions sur l’enseignement supérieur, 200 000 bourses familiales, etc.), on en oublie la réalité quotidienne du sénégalais moyen. Sans chercher à épuiser le syndrome, il serait important de présenter quelques symptômes et la pathogénie d’un diagnostic de la « chiffrite » qui nous envahit. Pour ce faire, nous prendrons la performance de l’agriculture (justification du MEF) ainsi que de l’enseignement supérieur et de la recherche (condition de durabilité des performances économiques). 

En justifiant son nouveau taux de croissance, le MEF met en avance la performance de l’agriculture comme s’il ignorait que les chiffres annoncés seraient imaginaires et difficilement acceptable pour les spécialistes indépendants. Elles nous disent que la production est de 917 371 tonnes de paddy dont 57% de riz pluvial, soit une augmentation totale de 64% (sic). La production de ces chiffres est laborieuse si on reste dans leur logique (surface emblavée et taux de rendement). En valeur absolue, le pluvial aurait produit 522 901 t (57%) et l’irrigué à travers la SAED et la SODAGRI seulement 394 469 t. 

Si l’on considère le taux de rendement (7%) annoncé en irrigué, 56 352 ha auraient été emblavés dans les vallées du Sénégal et de l’Anambé alors que des milliards (machine agricole et les aménagements) ont été injectés dans ces zones. C’est inimaginable que la SAED dont les prévisions d’emblavement en contre saison chaude (2015) étaient de 54 400 ha, puisse se retrouver à disputer 56 352 ha en hivernage avec la SODAGRI. Ici nous sommes dans l’hypothèse positive pour laquelle les 900 000 t ne concernent que la campagne hivernale. 

Car dans l’autre hypothèse où il faut ajouter au 900 000 t de la campagne hivernale, la production de la contre saison chaude de la SAED (54 400 ha x 7 t /ha =380 800 t), le Sénégal aurait déjà atteint l’autosuffisance en riz ciblé (1500 000 t), car 900 000 t + 380 800 t= 1280 800 t ou dis moins « il ne lui reste qu’1 km pour atteindre le mettre » comme dirait Jean Miché Kankan. Avec les efforts fournis par les deux sociétés, ces chiffres sont inacceptables et, à la limite, insultants pour les agents de la SAED et de la SODAGRI, ainsi d’ailleurs que pour l’administration territoriale de Saint- louis, Matam, Bakel, Kolda et Bignona. Pire, ils sont inquiétants pour la politique productiviste basée sur le rééquipement paysan et la maitrise de l’eau du Président Sall. Mais le symptôme caractéristique de la « chiffrite », c’est la morbidité « paranormale ». 

Par ailleurs, même si le Sénégal atteignait le taux fourni par le MEF, pourrait- il le maintenir durablement si l’université est malade de son calendrier et de ses salaires, malgré la concertation sur l’enseignement supérieur et les décisions prises par le président. Dans la majorité des établissements d’enseignement supérieur, l’année 2015-2016 n’a pas encore débuté et elle ne débutera pour tous les établissements au plus tôt qu’en Février 2016 si et seulement si ….. Ici, le taux de 100% d’orientées est problématique. 

En effet, après l’euphorie de la réussite de leurs enfants au baccalauréat, l’inquiétude gagne toutes les familles de sénégalais moyen devant l’impossibilité de n’avoir aucune information sur la période de début de cours à l’université. Les jeunes en vacance (de juillet à Février : 8 mois de vacance) peuvent facilement tomber dans l’oisiveté, mère de tous les vices. La focalisation sur le taux d’orientation (chiffrite), en justifiant que le Sénégal est loin d’atteindre le taux normal (sic) de fréquentation de l’enseignement supérieur, n’a de sens que si les cours commencent et se terminent normalement. On peut toujours objecter que les enseignants et étudiants sont aussi responsables de la situation, mais la responsabilité du gouvernement est principale car cette situation n’a commencé que depuis les élections de 2012. 

Pourquoi, ne parvient- on pas à résoudre ce problème alors que plusieurs schémas de résolution existent. Il s’agit de prendre une décision courageuse et juste pour rompre ce cercle vicieux et inquiétant qui décrédibilise l’année académique sénégalaise. Passons sous silence, l’absence d’une véritable politique de recherche (malgré les 92 millions du PAPES destinés affectés aux chercheures), les difficultés de l’université virtuelle (qui absorbe une part importante des bacheliers) et surtout le retard de salaire des travailleurs des universités (qui, allant crescendo, va jusqu’au 16 du mois suivant et touche aujourd’hui presque toutes les universités). On ne sait d’ailleurs pas pourquoi le nombre 8 (nombre de mois de vacance du bachelier d’une part et d’autre part date pendant laquelle on peut valablement parler de retard de salaire) ne figure pas dans leurs chiffres. 

Le secteur agricole et de l’enseignement supérieur ne sont ici que des exemples. D’ailleurs, pour ces secteurs, les éléments de diagnostic ci-dessus présentés ne sont que la face visible de l’iceberg. L’année 2016 devrait être, s’il n’est pas tard, impérativement celle d’une rectification (traitement symptomatique) car la rupture annoncée n’a pas eu lieu avec la même politique sectorielle productiviste paysanne (avec un peu plus d’investissement financier) et la même politique populiste de massification des universités (avec en moins la bourse ou l’aide pour tous) depuis 2000. 

Pour ce faire, il ne faut surtout pas s’affoler à cause des rangs occupés dans les classements des institutions internationales alors que nous ne sommes pas dans un même système de développement. C’est cet affolement qui est responsable de la « chiffrite ». Pour que ces classements reflètent notre réalité, on devrait aller vers la rupture véritable (traitement étiologique) en adoptant une approche plus systémique de développement car le PSE est bâti à travers une approche trop sectorielle. 

Amadou NDIAYE 
UFR S2ATA UGB 

 

 

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