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La sauvegarde des intérêts du Port de Dakar à l’origine de l’avalanche de drogue au Sénégal

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L’OBS – Le trafic de drogue en provenance principalement du Mali, pose aujourd’hui un véritable problème aux populations sénégalaises et à l’Etat. Une situation d’autant plus inquiétante que ce sont plus de trois tonnes (3 000 kg) de chanvre indien qui ont, en l’espace de quelques semaines, transité au Sénégal, grillant la plupart des  dispositifs de contrôle et de sécurité. Comment en est-on arrivé là ? Qu’est-ce qui explique une telle avalanche de drogue dans le pays ? L’Observateur a rencontré les différents responsables des forces de sécurité et de contrôle (police, gendarmerie, douane) et a trouvé l’origine du mal. 

«Inquiétant», «préoccupant», «grave». Comme la drogue envahit le pays, les qualificatifs escortent les records de saisies : trois mille kilogrammes de chanvre indien en quelques semaines et des dizaines de kilos de drogue dure. Jamais dans l’histoire du Sénégal indépendant, des produits psychotropes, hautement prohibés et très dangereux pour l’avenir de la jeunesse, ont été aussi présents, en ce laps de temps, sur le territoire national. Conséquence : dans les hautes sphères de l’Etat comme dans les chaumières mal éclairées du Sénégal des profondeurs, les questions fusent de partout. Comment autant de drogue, venue essentiellement du Mali, selon les autorités policières, a pu passer nos frontières ? Les forces de sécurité préposées aux différents postes de contrôle n’ont-elles pas failli à leur mission ? Est-ce que les quantités de drogue saisies et exposées aux yeux du peuple à grand renfort médiatique ne sont pas une opération de com’ des forces de sécurité dont certains éléments sont salement éclaboussées par des affaires de trafic de ces produits illicites ? Si les questions sont aussi diverses que les différent(e)s types ou qualités de drogue saisi(e)s ces dernières semaines, les policiers, gendarmes et douaniers rencontrés pour répondre à ces interrogations indexent tous le corridor routier Bamako-Dakar comme l’origine du mal.

L’assouplissement des contrôles pour des intérêts économiques

Construit pour renforcer l’intégration économique régionale, le corridor Bamako-Dakar est devenu aujourd’hui la route de la drogue. Un haut lieu de trafic de produits illicites facilité par l’assouplissement des différents postes de contrôle qui ont drastiquement été réduits à  trois : Kidiria – Kaolack – Dakar. Une mesure dictée, selon le commissaire Mame Seydou Ndour, Directeur de l’Office central de répression du trafic illicite de stupéfiants (Octris) par le respect par le Sénégal de la convention de la Cdeao sur la libre circulation des personnes et des biens. «L’assouplissement de ces postes de contrôle, révèle le commissaire Mame Seydou Ndour, s’explique aussi par la nécessaire prise en compte de la compétitivité du port de Dakar, qui est concurrencé par d’autres ports de pays de la sous-région.» Une mission de sauvegarde de l’intérêt national qui a certes des retombées positives sur les finances publiques nationales, mais qui comporte aussi son lot d’effets pervers sur la sécurité du pays. Surtout sur le contrôle des personnes et biens qui entrent au Sénégal. «D’ailleurs, conviennent des responsables de la police, de la gendarmerie et de la douane, ils est très fréquent de recevoir des instructions allant dans le sens de l’allégement du dispositif sécuritaire et de contrôle sur les axes qui desservent les pays de la sous-région et principalement sur le corridor Bamako-Dakar.» A cela s’ajoute, selon toujours la hiérarchie des forces de sécurité sénégalaises, la position de l’Observatoire des pratiques anormales sur le corridor, qui s’érige en bouclier pour éviter que les actions soutenues des forces de l’ordre ne se traduisent en tracasseries policières ou en obstacle aux intérêts du port de Dakar, qui est un poumon économique de taille pour le pays.

La célérité dans le contrôle fait l’affaire des convoyeurs de drogue

«Cette situation donne du fil à retordre aux forces en présence, en ce sens que nous sommes confrontés au dilemme qui consiste à trouver un juste équilibre entre la célérité dans le contrôle et la rigueur dans la sécurisation», explique le colonel Abdoulaye Fall des Douanes.   Or, ajoute-il : «Ce sont là deux notions qui a priori ne vont pas forcément de paire et qui, de plus, font les affaires des convoyeurs de drogue et autres délinquants.»

En plus de cela,  il y a  l’éternel problème du manque d’effectifs et d’équipements adéquats au niveau des postes de contrôle. Selon un haut gradé de la gendarmerie, les moyens humains et matériels ne sont pas à la hauteur du défi de sécurisation du corridor. «Ce sont des centaines, voire un millier de véhicules, ainsi que des tonnes de marchandises, qui transitent quotidiennement par cet axe routier international. Contrôler rigoureusement tous ces véhicules, les passagers et leurs marchandises, cela nécessite un travail titanesque. Si au même moment, nous sommes tenus de prendre en compte les directives relatives à l’allégement des contrôles, c’est quelque part antinomique. Même s’il ne faut pas occulter la noblesse de l’esprit qui gouverne ces directives.»

En revanche, le colonel Fall, soulignant les efforts constants déployés par la hiérarchie douanière pour densifier le maillage sur l’ensemble des corridors qui desservent l’intérieur du pays, dont le second corridor malien, appelé le corridor du Sud, rencontre quelques difficultés. Des problèmes nés de la volonté de l’Etat malien à mettre plus de célérité dans le contrôle des véhicules venant de Bamako. «L’ouverture effective de ce second corridor du Sud émane des autorités maliennes, qui en ont fait la demande afin de permettre aux convois de véhicules maliens de gagner beaucoup plus de temps. Du coup, ces convoyeurs ont la possibilité de rejoindre l’intérieur du pays en contournant Kidira. Ils accèdent au Sénégal via l’axe Moussala – Saraya. Le problème est que le maillage sur ce corridor du Sud n’est pour le moment pas aussi dense que celui de Kidira. Une situation qui a poussé l’administration douanière à structurer cet axe, par la mise en place effective de dispositifs adéquats et opérationnels. Le dispositif de maillage n’étant pas encore totalement au point, ce sont les éléments de Saraya qui s’y déploient de façon constante pour assurer les missions régaliennes. «D’ici là, il faut convenir que cette situation est profitable aux convoyeurs de drogue, qui font montre d’une grande ingéniosité pour se tirer d’affaire», reconnaît, d’une traite, le colonel Fall.

STATISTIQUES

3 000 kg de chanvre saisis en quelques semaines

Dans la nuit du 4 au 5 mars, les éléments de la Brigade de recherches du commissariat de Yeumbeul ont réussi un joli coup de filet, en mettant la main sur une quantité forte de 1,5 tonne de chanvre indien, composé principalement de la variété «niakoy». Le butin est saisi à la plage de Mbao et les premières conclusions de l’enquête attestent que la marchandise provenait des îles Karone (Casamance) et de la Gambie.

Dans la nuit du 12 mai, les limiers du commissariat urbain de Rufisque se sont illustrés par la saisie de 230 blocs de 2 kg chacun, soit un poids total de 260 kg de chanvre indien, (variété : brown). Une quantité qui avait été dissimulée sous la cale du plateau d’un camion immobilisé dans un coin isolé entre «le garage malien» et le littoral. Les limiers qui avaient essuyé des tirs d’arme à feu des convoyeurs de la came ont également découvert sur place 20 cartouches de balles contenues dans un chargeur.

Le 14 mai, les gendarmes de Keur Massar se distinguent par la saisie de 800 kg de chanvre indien (variété : brown). Des termes de cette procédure, il ressort que la drogue a quitté le Mali le 4 mai dernier par voie terrestre. En sus de la marchandise saisie et placée sous scellés, les pandores ont également mis la main sur deux Sénégalais, mais ils ont été semés par le troisième convoyeur, un sujet malien activement recherché.

Dans la nuit du 12 au 13 mai, les éléments opérationnels de la Brigade de gendarmerie de Nguinth (région de Thiès) ont mis la main sur une quantité forte de 510 kg de chanvre (variété : bronw) d’une valeur marchande de 17 850 000 FCfa. Cette cargaison en provenance du Mali avait été stockée à Ngoundiane. Le même jour, l’Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (Ocrtis) a mis la main sur 1 tonne 10 kg de chanvre indien (brown) dans la commune de Pout. En sus de cette saisie qui affiche une valeur marchande de 101 millions de francs Cfa, les limiers de l’Ocrtis ont appréhendé le convoyeur de cette came, un sujet malien répondant au nom d’Ibrahima Kanté, né en 1975 à Bamako. Ces acolytes en fuites ont été localisés au Mali.

Le 25 avril 2014, c’est une baronne du trafic de drogue, la dame Bintou Diassy, qui échoue à Thiaroye dans le panier à salade des limiers de l’Ocrtis, avec un restant de stock de chanvre de 18 kg (variété : bronw), en provenance du Mali, et «Fogny», en provenance de la Casamance. Cette longue liste qui est loin d’être exhaustive traduit l’ampleur des failles qui ont permis le transite d’autant de quantité de drogue, au Sénégal dans une période très réduite.

Du côté de l’Administration des douanes, des saisies de même envergure sont effectuées dans le trimestre allant de la période de janvier à avril 2014. Dans le courant du mois de janvier, renseigne le Colonel des Douanes, Ablaye Fall, les soldats de l’économie ont saisi 213,3 kg de chanvre. Dans le courant du mois de février, ce chiffre est largement monté en flèche avec une saisie globale de 530,10 kg, contre 172,45 kg saisis dans le courant du mois, soit environ une tonne de chanvre indien saisie, en seulement trois mois, par la Douane.

STRATEGIE DE LUTTE CONTRE LES DEALERS

«Un maillage plus dense et à l’échelle nationale a permis de couper l’herbe sous les pieds des trafiquants» 

Les saisies en cascade d’autant de quantités de chanvre indien n’ont été possible, renseignent respectivement le Commissaire Ndour de l’Ocrtis, le Colonel Fall des Douanes et un officier de la gendarmerie qui a requis l’anonymat, que grâce à une réelle volonté des hiérarchies des Forces de sécurité et de contrôle à prendre à bras le corps ce fléau. Ce qui s’est traduit, précise le patron de l’Ocrtis, par des instructions fermes ponctuées par une mission de maillage à l’échelle nationale qui a permis de couper l’herbe sous les pieds des trafiquants. Même si le Directeur de l’Ocrtis n’a pas souhaité s’épancher sur les termes de ce maillage, arguant le secret des stratégies policières, il s’est félicité du résultat exemplaire obtenu.

Même son de cloche du côté de la Douane. Pour le Colonel Ablaye Fall, les résultats obtenus sur le terrain résultent de l’accompagnement de la hiérarchie, mais aussi des éléments sur le terrain qui, avec les moyens du bord, mènent une guerre sans répit contre les délinquants de tous acabits.

A. D.

COMMENTAIRE

Par là, la voie du salut

Des constats faits sur les différents corridors qui desservent le pays, ils ressort aujourd’hui qu’une lutte plus efficace contre le trafic international de chanvre indien passerait par une densification plus soutenue du maillage des principaux axes de transit, à s’avoir, l’axe du sud (Casamance), les corridors (gambiens, maliens), le port, l’aéroport et le littoral. Une volonté politique qui devrait être mise en œuvre avec une implication plus forte et plus structurée des services de renseignement, notamment la Direction de la surveillance du territoire (Dst), la direction de la documentation de la sécurité extérieure (Ddse) ou encore la Direction de la police de l’air et des frontières, (Dpaf). Une mutualisation des forces de sécurité pour une synergie d’actions, mais aussi une collaboration bilatérale avec nos voisins maliens.

A. Diedhiou

SOURCE:http://www.gfm.sn/la-sauvegarde-des-interets-du-port-de-dakar-a-lorigine-de-lavalanche-de-drogue-au-senegal/