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Sénégal - Les travailleurs des collectivités locales face au scandale des milliards, aux milliards scandaleux étalés

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argent public

J’aime bien voir, et c’est toujours un motif de satisfaction pour moi, un sénégalais ou un africain par la force de sa créativité et de son travail gagner des millions, des milliards.

Cela Parce que je crois fermement à un Sénégal qui gagne, une Afrique qui gagne…

Mais aussi, de la même manière, je suis affligé au plus profond de moi-même lorsque je vois presse rapporter à n’en plus finir des exemples d’enrichissement personnel s’élevant à plusieurs milliards de membres de nos élites politiques.

 

En effet, c’est un véritable scandale, que dans un pays pauvre et à construire comme le Sénégal, des gens qui n’ont eu aucune autre activité que des charges publiques fassent étalage de tant de richesses, créditant encore une fois, l’idée selon laquelle, face à une écrasante majorité vivotant et peinant à accéder a des services sociaux de base, à cause de la carence d’un Etat de ses démembrements, qui ont presque démissionné depuis des lustres de leurs missions de service public, qu’une infime (ou plutôt une infâme) minorité accapare les maigres biens de ce pays. Et ceci, jusqu’à ce que l’allocation de ressources à travers des politiques publiques visant à corriger les inégalités sociale dans la santé, l’éducation et tant d’autres secteurs stratégiques soit compromise.

 

 

C’est un véritable scandale , d’assister à ces tristes spectacles de gaspillage des ressources publiques dans des programmes dont la pertinence et la priorité n’ont été fixées que par des oligarques, dont la seule motivation , dans bien des cas, ne repose que sur une volonté secrète, de bénéficier à titre privatif des retombées financière d’une ‘’dépense publique’’.

Qui parlait encore de la gestion privative des affaires publiques sous nos cieux ?

Qui parlait de l’exercice abusif du pouvoir discrétionnaire à des fins de népotisme et de clientélisme politique sous nos cieux ?

A-t-on une mesure du niveau insoupçonné de la posture de conflits d’intérêts (à l’heure actuelle banalisée) chez nos élites ?

C’est alors, dans un tel contexte de milliards du scandale et de scandale de milliards qu’en véritables parias de nos administrations publiques, les travailleurs des collectivités locales, ont fait irruption sur la scène en réclamant ce qui leur est dû en tant que citoyens de ce pays, mieux en tant que composante socioprofessionnelle.

De quoi s’agit-il ?

D’abord, de manière ponctuelle, en droite ligne de la reforme dite Acte III de la décentralisation, a été votée et promulguée la Loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013 portant Code général des Collectivités territoriales et ses décrets d’application ont suivi.

Le cadre de collaboration entre Villes et communes d’arrondissements a été modifié. Ainsi, les tenants de la réforme, en voulant, faire des anciennes communes d’arrondissement des communes de plein exercice, ont franchi un point tant redouté par les acteurs avertis. Ils ont alors remis en cause le fragile équilibre que le législateur de 1996 avait instauré, à savoir, que la Ville pourvoit au personnel technique des Communes d’Arrondissement et en supporte le salaire.

L’équilibre alors était, que, non obstant, le principe de la prohibition de toute tutelle entre collectivités locales, on ne pouvait pas grever de charges salariales les maigres budgets des communes d’arrondissement. Car, étant par essence des administrations de proximité, il leur fallait assurer sur les recettes prévues par la loi le financement de leurs dépenses de fonctionnement, avec une possibilité d’avoir des dépenses d’investissement à un pourcentage acceptable du budget.

Le système, bon en mal en, a marché, la formule fut que , par le biais de mise à disposition, les agents de la Ville allaient servir dans les communes d’arrondissement. Ainsi, à la différence de la position du fonctionnaire en détachement, la Ville, leur administration d’origine, continuait d’assurer le paiement de leurs salaires.

Ce système mettait ainsi les communes d’arrondissement, pour la quasi majorité aux ressources financières si réduites, à l’abri de pressions telle que la prise en charge mensuelle de la masse salariale du personnel de leurs services techniques. Hormis bien sûr, le petit personnel recruté en complément d’effectifs.

C’est donc ce système à équilibre fragile que l’Acte 3 est venu remettre en cause.

D’abord, les anciennes communes d’arrondissement, passant, selon, les tenants de la reforme entreprise en ‘’commune de plein exercice’’ se verront accordées en principe le pouvoir de recruter leur personnel.

Ensuite, qui peut le plus peut le moins, cette compétence s’accompagna d’une obligation de prendre en charge le salaire de tous les agents en service à la commune. Et comme dit plus haut, ces agents dans leur presque totalité sont des agents de la Ville.

Plus grave , par décret N°2014-926 du 23 Juillet 2014 portant conditions de dévolution du patrimoine de la Ville et redéploiement du personnel des régions et anciennes Villes , que différents règlements ont assuré l’application, les personnels des Villes mis à disposition des anciennes communes d’arrondissement sont d’autorité reversés aux communes où ils étaient en service au moment de l’entrée en vigueur de la loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013 portant Code général des Collectivités territoriale et ses décrets d’application.

Or, le problème fut que, malgré, le transfert de certaines lignes de recettes aux anciennes communes d’arrondissement, la prise en charge correcte de la masse salariale de ce personnel nouvellement redéployé resta impossible.

Sur ce point, l’Intersyndicale des Travailleurs des Collectivités Locales, avait suffisamment tiré sur la sonnette d’alarme, mais resté sourd à ces appels, l’Etat du Sénégal avait persisté dans sa décision.

Et à ce jours, les travailleurs des collectivités locales en services dans les ancienne communes d’arrondissement peinent à percevoir leurs salaires. Dans certaines communes, il y a retard est de plusieurs mois.

Face à cette situation, la parade trouvée est pour l’Etat d’accompagner en prenant temporairement en charge le paiement des salaires.

Si ce provisoire se poursuit, faute d’une viabilité du système mis en place par l’Acte 3 de la décentralisation, on court le risque de voir une situation inédite se produire dans un système décentralisé. En effet, un tel système, par l’autonomie relative qu’elle confère aux entités décentralisées s’accommode mal avec une politique de ‘’mise en perfusion’’ de la part du pouvoir central. Parce que tout simplement de par la loi et le règlement les collectivités locales doivent disposer de ressources leur permettant de prendre en charge toute les dépenses inscrites dans leur budgets tant dans la section ordinaire (dépenses de fonctionnement, dont salaires des agents) et la section extraordinaire (investissements).

A ce jour, devant les graves dysfonctionnements générés par cette réforme, les travailleurs des Collectivités locales redéployés demandent à voir la prise en charge de leurs salaires retourner à la ville comme au temps d’avant.

Ensuite, d’une manière plus globale depuis 2004, les travailleurs des collectivités locales, représentés par leur Intersyndicale, sont entrés en contact avec l’Etat du Sénégal pour mettre en œuvre, dans une approche inclusive et participative, une reforme aboutissant à un statut clair, valorisant et sécurisant pour les travailleurs.

Il s’agissait alors d’une loi conférant un statut aux corps des fonctionnaires des collectivités locales.

Travailleurs comme État, pendant sept longues années, ont travaillé d’arrache-pied pour mettre en œuvre une telle réforme, et ceci malgré la grave instabilité ministérielle qui caractérisait le Département des collectivités locales.

Ainsi, de la première rencontre de l’Intersyndicale avec Ousmane Ngom en de 2004 à l’Hôtel Indépendance jusqu’à la promulgation de la loi N° 2011-08 du 30 mars 2011 portant statut général des fonctionnaires des collectivités locales, Aliou Sow étant ministre des Collectivités Locales, quatre ministres sont passés par ce département.

Mais au moins, la loi a été promulguée et plus d’une dizaine de décrets d’application pris.

Mais alors, si euphoriques au départ, les travailleurs des collectivités locales, qui avaient unanimement salué l’avènement de cette loi, qui du reste mettait en cohérence leur statut avec le niveau de développement de notre décentralisation, déchantèrent très rapidement.

En effet, depuis son arrivée au pouvoir 2012, il semble que le régime du Président Macky Sall ne se presse pas pour rendre effective cette loi votée et promulguée, et de surcroit, dont les décrets d’application ont été pris.

Ce qui étonne fort, quand on sait que dès 2012 le Président Macky Sall a pris les deux décrets complétant la partie règlementaire du statut de la Fonction Publique Locale.

Et en plus l’instabilité ministérielle qui se poursuivait.

La très pragmatique Madame Arame Ndoye , fut remplacée par Maitre El Hadj Oumar Youm, ce dernier, dans son agenda, plus préoccupé à mettre en œuvre la réforme de l’Acte 3, au besoin au forceps et en procédure d’urgence, que de mener à bonne fin la mise en place du statut de la fonction publique locale , ‘’migra’’ du Gouvernement à la Présidence pour être remplacé par Monsieur Abdoulaye Diouf Sarr.

De ce fait, à la troisième année de magistère du Président Sall, nous totalisions déjà trois ministres de tutelle pour les collectivités locales !

A ce jour, l’orientation du President Macky Sall, a été jusque-là, nous semble-t-il de poursuivre au pas de charge la réforme de l’Acte 3, sans vraiment essayer de la mettre en cohérence avec la loi sur le statut de la fonction publique locale. Plus grave bien des fois, nous avons senti un forcing qui se fait en violation des principes de justice et d’équité qui fondent une protection des droits des travailleurs des collectivités locales pourtant en situation légale et règlementaire.

Une telle manière de procéder ne fait qu’exaspérer davantage un climat déjà suffisamment vicié, et à la longue saper la confiance que cette catégorie socio-professionnelle avait vis-à-vis de l’autorité.

La seule chose qui peut rassurer les travailleurs des collectivités locales en ces heures c’est l’effectivité totale de la loi sur la fonction publique locale.

Et ceci, non pas pour créer une classe de fonctionnaires de seconde zone, non pas pour créer, une classe de fonctionnaires, comme on dit, entièrement à part, mais une classe de fonctionnaire à part entière.

Autrement, des fonctionnaires des administrations décentralisées, qui, au regard des principes généraux du droit et des règles matérielles prévoyant et organisant leur statut auront vocation, sous peine d’une rupture de l’égalité à bénéficier des droits et avantages reconnus à leurs homologues des administrations centrales.

Aussi, c’est avec un intérêt particulier , et au plus haut point que nous avons accueilli le communiqué du Conseil des Ministres du 24 Février 2016 lorsque « le Chef de l’Etat demande au Premier Ministre de veiller à la modernisation de la gestion des ressources humaines des collectivités locales, par l'application du statut général des fonctionnaires des collectivités locales, la formation et le reclassement des agents, l'adoption d'un système cohérent de recrutement et de rémunération, conforme aux lois et règlements qui régissent la Fonction publique. ».

Pour nous qui avions déchanté, c’est déjà important.

Mais pour ce faire, il faut que Monsieur le Président de la République, Monsieur le Premier Ministre et Monsieur le Ministre de la Gouvernance Locale usent de toute leur influence pour freiner cette cohorte de fonctionnaires tapis dans les administrations ministérielle qui trainent les pieds pour empêcher l’effectivité des certaines dispositions structurantes de la loi N° 2011-08 du 30 mars 2011 portant statut général des fonctionnaires des collectivités locales.

C’est le cas par exemple pour ce qui de l’intégration effective, qui traine depuis des années bien que l’Etat, par le biais de l’Agence pour le Développement Informatique de l’Etat (ADIE ) ait fait l’enrôlement des effectifs, avec une claire idée des agents qui veulent intégrer la nouvelle fonction publique locale, ainsi que de leurs profils et ancienneté.

Autre exemple, la constitution du corps de base, en application des dispositions transitoires de la loi précitée, nécessitant l’intégration d’agents qui sont actuellement en service. Cette intégration va aussi nécessiter une conservation, de leur droit à l’ancienneté. Car contrairement, à une opinion qui nous semble erronée de la part de certains fonctionnaires des ministères, qui veulent nous faire croire qu’à l’intégration l’agent perd son droit à l’ancienneté, l’ancienneté du travailleur est un droit acquis.

Elle est placée sous le signe de l’intangibilité des situations juridiques acquises. Elle permet par exemple, de déterminer le quantum du droit à une pension de retraite. L’ancienneté est la durée effectuée par l’agent dans son emploi. De ce fait, lorsqu’il faut envisager une fin négociée des relations de travail entre le travailleur et l’employeur elle entre en ligne de compte.

C’est dire que la force d’un tel droit est telle que, ni la loi, ni le règlement ne peuvent y porter atteinte.

Dès lors, si nous poursuivons la logique formulée dans les revendications des travailleurs, et contre laquelle certains fonctionnaires s’opposent, les futurs fonctionnaires des collectivités locales par voie de ‘’migration’’ vont quitter le régime d’affiliation à l’IPRES pour être affiliés au Fonds National de Retraite (F.N.R).

Et il nous semble qu’une telle éventualité pour l’Etat du Sénégal semble redoutée par certains fonctionnaire du Ministère des Finances, vu l’incidence financière qu’elle va générer. Et surtout, il semblerait également, que l’on n’ait pas une idée du montant.

A cela nous répondons d’abord que, toute réforme a un coût, mieux, que la loi a été votée, et ses décrets d’application pris, donc, l’Etat du Sénégal se doit de mener à une bonne fin la mise en place de la fonction publique locale.

Ensuite, il me semble étonnant que dans un pays comme le Sénégal, au vu du niveau de modernisation des services du Ministère des Finances qu’on n’ait pas par voie de simulation essayé de se faire une idée de l’incidence financière d’une éventuelle migration des fonctionnaires des collectivités locales du régime d’affiliation à l’IPRES vers le FNR.

Normalement, le cout déterminé, il reviendrait à l’IPRES, auprès de qui les employeurs ont cotisé de libérer les fonds qui doivent financer la migration des fonctionnaires des collectivités vers le FNR. D’ailleurs, cela s’est toujours passé ainsi dans de tels cas, le dernier en date, fut celui des maitres contractuels, vacataires etc. (voir le point 6 du protocole d’accord du 17 Février 2014 entre l’Etat du Sénégal et les Syndicats d’Enseignants).

Et il semblerait alors, d’après nos informations que cette incidence financière tournerait entre six et huit milliards, cela reste à vérifier, mais si tel était le cas, six, huit, voire neuf milliards ne représentent rien pour changer radicalement la situation d’une catégorie socioprofessionnelle de nos administrations publiques, en proie à la précarité.

Mais il reste à craindre le risque qu’une ponction d’un tel montant dans les réserves l’IPRES crée de graves perturbations dans le système de retraite du Sénégal.

C’est pourquoi, les propositions vont dans le sens de voir l’Etat du Sénégal prendre totalement ou partiellement en charge le cout de ce passage, il suffit au préalable de tout mettre en cohérence avec la la loi n° 81-52 du 10 juillet 1981 portant Code des Pensions civiles et militaires de Retraite avant que , sur instructions fermes mettre les services des différents ministères au travail.

Il suffit pour ce faire, d’une volonté politique.

Or sur ce point, en fait de volonté politique, on a vu pour les enseignants, il y a quelques années de cela, l’Etat du Sénégal s’ engager à leur octroyer les sommes de 07 milliards de francs en 2009, 08 milliards en 2010 et 09 milliards en 2011 au titre de l’Indemnité de recherche documentaire (IRD).

Et devant la pression n’a pas hésité à casser la tirelire ….

Et pourtant, si on regarde la dépense, cette indemnité était juste un accessoire de salaire, qui est sans commune mesure avec une mesure aussi structurante et aussi fondamentale que la mise en place de la Fonction publique locale.

Mais de cette absence de volonté, outre la mauvaise foi de certains fonctionnaires des départements ministériels semble découler du mépris que l’Etat contre les travailleurs des collectivités locales.

Sauf, que les travailleurs des collectivités, qui ne sont pas des demeurés, à l’instar de tous les sénégalais sont témoins de la valse endiablée des milliards prélevés sur l’argent du contribuable et affectés à des dépenses non prioritaires, voire, pire, atterrir (de manière avérée ou non) dans des comptes privés.

Les grosses fortunes subites de certaines de nos élites politiques, qui, de par leurs positions politiques accèdent à des fonds, qui dans la plupart des cas ne sont pas traçables du point de vue des règles et mécanismes budgétaires étatiques, ont fini de transformer notre État en leur vache laitière.

Mais ça c’est des choses qui fâchent et ceux qui en parlent sont considérés comme des aigris...

Justement, j’ai choisi d’en être un.

Moussa NDIAYE

Juriste Cadre des Collectivités Locales

Conseiller aux Affaires Communales en service à la Ville de Dakar

 

Cyber citoyen.